Une Royale, s'il vous plait. [Libre]

Zack rentra dans la pizzeria, un peu paumé, comme à son habitude. Il passait toujours ses samedis à errer dans Central Park, ou au zoo, ou au Met, d'habitude. Aujourd'hui, Dieu savait pourquoi, ses pas affamés l'avaient amené jusque dans cette pizzeria qu'il fréquentait de temps à autres. Entre une mère toujours au travail et un beau-père dont les heures de sommeil se situaient entre quatre heures du matin et deux heures de l'après-midi, les heures de repas n'avaient jamais été vraiment un repère, pour sa famille. Lorsqu'ils avaient faim, ils descendaient au café, acheter un doughnut, un hamburger, un hot dog, une pizza, ou des plats chinois. Et ce n'était pas cette overdose de fast food qui empêchait Zack d'être un vrai gringalet. Il ne l'était peut-être pas autant qu'il voulait bien le croire, d'accord. Mais enfin, on aurait pu penser que, à défaut de muscle, il aurait pu prendre un peu de gras, histoire de faire un peu viril. Perdu.

Bref, il entra dans la pizzeria. Depuis longtemps, il ne se formalisait plus de manger seul, il en avait pris l'habitude. Comme des dizaines d'hommes d'affaires et quelques dépressifs, il commandait ce qu'il voulait manger (aujourd'hui, c'était une grande pizza royale : jambon, champignon, fromage, il se sentait d'attaque pour avaler la ville entière, s'il le fallait), et puis il allait s'asseoir sur les sièges, devant le comptoir qui faisait face à la vitrine. Ainsi, il pouvait voir les gens passer, dehors. Il se fichait qu'on le voit. Il ne connaissait personne, et ceux qu'il connaissait, il ne les aimait pas, bon, tout le monde le savait, non ?

Il était donc près à passer une bonne partie de l'après-midi installé confortablement ici : un grand verre de limonade rose, une grande pizza et un journal ouvert devant lui. Certains auraient pu se demander pourquoi il ne restait pas chez lui. C'était une vieille habitude qu'il avait prise étant gamin : à l'époque où son demi-frère et ses copains avaient pour rituel de passer leur samedi devant la console de jeux vidéos du salon. A cette époque-là, il aurait fait n'importe quoi pour éviter de se retrouver dans l'appartement en même temps qu'eux, et il se débrouillait pour toujours aller se promener pendant des heures, ces jours-là. Et puis, l'autre imbécile était parti, ses copains avaient arrêté de venir, mais lui avait continué à passer ses samedis à l'extérieur. Peut-être pour ne pas que sa mère lui reproche à tout bout de champ de ne jamais sortir, comme elle le faisait déjà suffisament souvent. Il eut un pincement au coeur en pensant au cadeau qu'elle lui avait fait, récemment : les 100$ d'entrée pour cette stupide soirée, le Midnight Carnival. Bien sûr, il aurait pu ne pas y aller, et garder l'argent pour autre chose. Mais il ne voulait pas faire de peine à sa mère. Il faudrait donc qu'il se force.

Et pour éviter, à l'avenir, les situations embarrassantes de ce genre, il vaudrait mieux qu'il se trouve un job, et qu'il prétende qu'il avait de quoi payer tout ce qui lui ferait envie. Ici ? Non merci, si c'était pour que tous les gars de St Jude le surnomment 'pizzaiolo' pour le reste de sa scolarité, ça irait, franchement. Oh, il finirait par trouver... Il était encore jeune, pour vraiment travailler.

Il avait bien avancé dans sa pizza, et l'après-midi, jusque-là, n'avait pas réservé de surprise particulière. Après avoir fini son journal, il était passé à un livre, The Master of Ballantrae, par Stevenson. Ce n'était pas vraiment par plaisir qu'il le lisait (quoique ce fût assez correct comme niveau d'amusement), mais parce qu'il devait l'étudier en cours de toutes façons. Il allait entamer la deuxième moitié de sa pizza qui commençait à être vraiment froide (mais bonne, il n'y avait pas à dire), lorsqu'une fille prit une place à côté de lui.

Il l'observa un moment, répondant machinalement à son sourire, sans y faire vraiment attention. Il n'était pas très habitué aux intéractions avec d'autres. Elle avait des cheveux et des yeux noirs, une peau brune. Elle devait venir d'Amérique du Sud. A fréquenter trop souvent l'Upper East Side, puisque c'était là qu'était son école, à défaut de son lieu de résidence, il en oubliait parfois que New York était l'une des villes les plus mutliculturelles qui soient. Il continua à l'observer du coin de l'oeil. Ses contacts avec les filles étaient moindres, puisque son lycée n'était pas mixte, et il ne savait donc pas vraiment si les vêtements qu'elle portait étaient ou non à la pointe de la mode, ou même s'ils étaient de créateurs célèbres, comme de nombreuses filles qu'il était supposé fréquenter, allant à St Jude, et qu'il ne souhaitait pas tant voir que ça, en fait.

Il en était là de ses observations lorsqu'un peu de sauce tomate se mit à couler de sa part de pizza directement sur les feuilles de son livre.

*Merde !*

Il arrêta l'"hémoragie" en mordant dans sa part, histoire que le flux stoppe, et tenta d'éponger le tout avec la serviette en papier qu'il avait prise un peu plus tôt, mais le résultat n'était pas très concluant. Super. Il était passé du stade du 'gars qui mange une pizza tout seul devant une vitrine' à celui de 'gros porc incapable de manger proprement'. Oh, comme sa voisine devait avoir une haute opinion de lui, à présent. Mais qu'est-ce que ça pouvait faire, après tout ? Il tenta quand même un sourire timide et désolé, même s'il n'avait pas à être désolé par rapport à elle, il ne lui avait rien fait, après tout.

S'il avait été un autre, le genre de types sûrs d'eux et jamais à court de paroles qui fréquentaient St Jude, il aurait sorti un truc du genre 'voilà ce qu'il en coûte de trop regarder les jolies filles'. Mais franchement, il n'avait pas le profil, pour déclamer ce genre de babioles, alors il se contenta de baisser les yeux, plus ou moins rougissant malgré lui.

Alors qu'il se dépêtrait comme il pouvait, entre cette stupide tache, la part de pizza qu'il avait fini par reposer et ses doigts qu'il avait essuyé avec la serviette en papier, à sa plus grande surprise, la fille qui s'était installée à côté de lui un peu plus tôt s'approcha de lui. En fait, pas seulement. Elle s'approcha de lui et lui adressa la parole. Et pas juste pour lui adresser une remarque désobligeante. En fait, même pas du tout pour ça. Elle était en train de lui tendre du sel, en expliquant que ça servait pour enlever les taches.

"Ouah c'est... merci, c'est... je, enfin, c'est vachement gentil... merci, c'est..." bredouilla-t-il de moins en moins fort, avant que sa voix ne se perde, tandis qu'il appliquait le sel sur les pages du livre. En effet, les cristaux blancs se tintèrent très vite de rouge.

"Hey, ça marche !", fit-il, avant de remarquer que ça montrait carrément qu'il n'y avait pas cru lorsqu'elle le lui avait dit. "Enfin, je veux dire c'est euh... surprenant, 'fin, pas que je mette en doute ce que tu me disais... Je connaissais pas ça, c'est..."

*Tais-toi, tais-toi, ça suffit, les imbécillités.*

Voilà ce que ça coûtait, de ne jamais parler à personne, lorsque l'occasion se présentait, on manquait sérieusement d'entraînement. Il se tut une nouvelle fois, et enleva le surplus de sel. Il restait une tache colorée sur le livre, mais c'était plutôt bien parti. Il se rassura en se disant qu'heureusement, ça n'était pas un livre de bibliothèque. Certes, c'était celui de son 'demi-frère', mais pour la fréquence à laquelle il arrivait à celui-ci d'ouvrir un livre, il ne s'en faisait pas trop, il y avait des chances que le méfait ne soit pas découvert avant une bonne quinzaine d'années, lorsque le fils du propriétaire devrait l'étudier à son tour.

Il repporta soudain son attention sur la brunette qui lui avait donné ce précieux conseil. Désormais, il pouvait la classer plus facilement. Certainement pas une princesse de l'upper. Quelque part, ça le rassurait. Il était plus à l'aise avec les filles 'normales'. Enfin, plus à l'aise, non. Moins mal à l'aise, disons.

"Ben euh... merci...", fit-il avec un sourire timide, qui avait presque peur d'éclore. "Euh je euh... tu veux une part de pizza ?"

*Brillante idée, bravo. Tu lui offres de la pizza alors qu'elle en a une sous le nez, et une chaude, en plus, alors que la tienne est déjà froide. Bravo, Zack, vraiment.*

"Enfin, peut-être pas, c'est stupide, pardon...", reprit-il. Il ne pouvait s'empêcher de bêtement bouger d'un pied sur l'autre, plutôt nerveux. Ah, il avait l'air malin, avec ses bracelets à piques, son sac noir, ses chaînes au cou, son t-shirt déchiré en bas et son rouge aux joues de collégien timide. Trop daaark. Bref. "Je euh... suis Zacharias. Enfin, Zack. Les gens disent Zack. Parce que Zacharias, c'est euh... Bizarre... Long... Enfin bref."

*Et j'ai sauté le chaître 'apprendre à rencontrer des gens', dans la vie*. C'était ce qu'il aurait dit si, justement, il ne l'avait pas sauté et avait pu tenter de rattraper ça par une petite note d'humour. Ca lui serait peut-être venu à l'esprit en d'autres occasions. Mais là, tout ce qui lui venait à l'esprit, c'était qu'il était de plus en plus ridicule.

La jeune méxicaine regarda le maladroit appliquer ses précieux conseils, et il fut vraiment surpris lorsqu'il se rendit compte que ce n'était pas des bêtises et que sa marche vraiment. Son comportement amusait beaucoup la jeune fille, car il était d eplus en plus géné et se sentait de plus en plus mal a l'aise, alors qu'en fait, cela faisait de lui quelqu'un de tres attachant et gentil, enfin, en apparence.
Lessa ria doucement et lui répondit avec humour.

"Biensur que sa marche. Tu sais, ce n'est pas dans mes habitudes de donner de faux conseils juste pour se moquer des gens. Enfin, je suis contente, j'aurais transmit le secret de ma grand-mère a quelqu'un, et j'espere que sa t'aidera dans d'autre circonstances"

Elle le regarda, vraiment tres amusé par son caractere et son comportement de petit ados tout déstabilisé devant les filles. Lessa l'écouta alors en souriant a s'en décrocher la machoir. Oui, en effet, le beau garcon ne pouvait l'empêcher de sourire, de rire même, mais pas un rire moqueur, loin de la. Elle était completement conquise pas son caractere tres attachant, doux et innocent. Elle l'écouta alors se présenter, apres qu'il lui est proposé de la pizza, et répondit en riant doucement.

"Non, c'est bien, je ne peux plus rien avalé, mais c'est gentil merci. Et bien, je suis ravie de faire ta connaissance Zack, moi c'est Lessa, Lessa Sanchez. Je suis nouvelle en ville, mais si tout les gens ici sont comme toi, alors je vais vraiment me plaire ici."

Elle le regarda avec un large, tres large sourire, tres rassurant et doux. D'ailleurs, elle aussi est d'un naturel timide, mais Zack l'avait mis en confiance du fait que lui l'est encore plus, c'est pour cela qu'on dirait que Lessa est tres sur d'elle.

Bon. Respire. C'est bien. Il parvint à sourire lorsque la jeune fille se présenta à lui. Nouvelle en ville, hein ? Il n'avait pas remarqué d'accent, à première écoute, mais en même temps, New York était reconnue pour être la ville qui n'avait pas d'accent, tant elle en avait. Enfin, ça ne l'avait pas empêché de devoir perdre très vite celui de l'Arkansas, lorsque, à neuf ans, il était arrivé ici, sous peine de devoir se faire traiter de tous les noms par ses camarades de classe. En tout cas, cette fille avait l'air particulièrement sûre d'elle, et en même temps... Terriblement innocente. Sûre qu'elle allait se plaire ici ? Eh bien, si c'était vraiment le cas, il lui tirerait son chapeau, franchement. Elle allait vraiment se faire bouffer... Mais regardez qui pensait ça...

"Ah euh... enchanté... aussi", fit-il, un moment après sa présentation, ne pouvant retenir un sourire. "Tu pourras dire merci à ta euh... enfin, à ta grand-mère..."

Il songea à la sienne, de grand-mère, celle sui préparait des tartes à la rhubarbe dans son ranch, et en laissait tomber des bouts exprès pour que les chiens les mange, tout en faisant semblant de s'accuser d'être vraiment maladroite. Elle aussi, elle savait sûrement comment faire partir une tache de sauce tomate avec du sel. Dommage qu'il ne passe pas plus de temps chez elle. Mais en ce moment, avec les cours, il ne fallait même pas y songer.

Un moment de silence gêné suivit ses paroles.

*Pense à quelque chose à dire. Pense à quelque chose à dire, n'importe quoi !*

Il essayait mais ça ne venait pas. Au lieu de ça, il referma le carton de sa pizza. Il aurait pu expliquer qu'il allait ramener le reste à sa mère, qui travaillait tard et était toujours contente de trouver des restes inattendus, lorsqu'elle arrivait à la maison. Mais ça, c'était une phrase un peu trop longue pour lui, et il doutait que l'hispanique soit vraiment intéressée par sa vie ô combien trépidante.

"Et euh, sinon tu... tu vas à l'école dans le coin, enfin euh si c'est pas trop euh... indiscret.", demanda-t-il finalement, histoire de meubler un peu.

Bon, ça aurait pu être une question intéressante s'il y avait eu une seule chance qu'ils fréquentent le même lycée. Mais étant donné que Zack était dans une école pour garçon euh... perdu. Enfin au moins, il avait dit quelque chose. N'importe quoi, en effet.

Lessa regarda le jeune homme, qui était vraiment tres marrant. En effet, ces petites mimiques de timidités étaient vraiment tres attendrissante a regarder. Il était vraiment tres attachant, et tres rapidemment la jeune meéxicaine se prit d'affection pour lui. Elle s'assit donc en face de lui tout en le regardant, avec toujours aux levres se magnifiques sourire.
Elle le regardait sans rien dire, avec ses grands yeux marrons qui pouvaient impréssioner plus d'un garcon, alors qu'en général, c'est elle qui est impréssionée par eux. Mais la, ce n'était vraiment pas le cas, et c'était assez plaisant comme situation. Puis, poour meubler la conversation, le charmant Zack lui demanda dans quelle école elle allait. Lessa allait dans une école pour fille, l'école Constance Billiard, tres réputée dans la ville pour son exigence mais aussi ses tres bons résultats et son taux de réussite important. La jeune femme, tout en remettant une mèeche de ses cheveux brun derrière l'un de ses oreilles, répondit d'une voix douce.

"Je suis a Constance Billiard, je sais pas si tu connais. C'est une école pour fille, la plus réputée dans le coin d'ailleurs. Une école pour fille... je trouve que sa fait vraiment sous-dévellopé. Enfin, au moins leurs uniformes ne sont pas trop ridicules, bien que je n'aime pas trop me mettre en mini-jupe, et puis, avec leur grandes chausettes. Et toi, tu étudie ou ?"

Elle ria doucement visualisant l'uniforme. En effet, bien qu'ils étaient tres sexy, oui, il faut bien l'avouer, et bien Lessa les trouvaient trop vulgaire a son gout. Enfin bref. Elle regarda donc son charmant interlocuteur en attendant sa réponse. Elle posa ses coudes sur la table et posa sa tête dans ses mains tout en regardant le jeune homme, attendant sa réponse.

Il ébaucha un sourire presque amer lorsque Lessa évoqua Constance Billard. Il ne s'était pas vraiment attendu à ça. Il avait pensé qu'elle fréquentait l'un des lycées du district et que, pour une fois, il venait de rencontrer une fille normale, avec une existence de petite Américaine normale. Raté.

"Mouais... je connais", fit-il sans bafouiller. "Je suis à St Jude, c'est un peu l'équivalent pour garçons. Je suis sûr qu'en blazer et pantalon à pinces, tu ne me reconnaitrais pas... Mais bon, on s'habitue, j'y vais depuis mes onze ans, alors..."

Parler de son école, surtout pour ne pas en dire trop de bien, le mettait plus en confiance. Certes, l'enseignement dispensé à St Jude était exemplaire, et il n'allait pas se plaindre de la culture générale fournie là-bas. Mais ç'aurait été vraiment beaucoup mieux si le reste des élèves avaient été là pour les mêmes raisons que lui, c'est à dire les études, plutôt que simplement parce que leur compte en banque était plein à craquer. Quant aux filles de Constance Billard... Il les considérait, si c'était possible, comme pire que les garçons de St Jude... Enfin, c'était une généralité, bien sûr. Il se garda quand même de les évoquer, peut-être que sa nouvelle connaissance ne partageait pas son point de vue.

"Mais bon, on y apprend bien, dans ces écoles...", fit-il pour ne pas qu'on croit qu'il était complétement blasé, en se remettant à rosir, d'un coup.

"Mais je vis à Williamsburg, au nord de Brooklyn", ajouta-t-il cependant. Il savait que les idées Williamsburg et St Jude ne collaient pas, dans les esprits des gens, en général. Il s'agissait en effet d'un quartier habité majoritairement d'ouvriers et d'artistes, pas trop le genre à pouvoir se payer une école pareille. En même temps euh... il ne pouvait pas se payer une école pareille, alors c'était la vérité.

"Tu es installée à Manhattan ? Enfin euh... je t'embête sûrement, je suis désolé, j'ai rien à faire et... bon, mais toi, tu dois être pressée."